
LOUIS BERTIGNAC
ça c’est vraiment moi ! On entre par une cuisine que l'on devine familiale, toujours prête à accueillir l'ami improviste.
À gauche, un studio, capharnaüm dévoilant une activité fébrile, une passion visiblement vivace. Au mur, à droite, des guitares, beaucoup, toutes belles, toutes différentes, pas des trophées, non, des outils, comme dans un établi, attendant de servir la création, une Dobro au sol, aussi un sitar, une batterie, des photos, des bougeoirs ottomans.
Un studio revendiquant une existence. Vivant. Au centre, l'ordinateur et un mur d'enceintes. Qui vont bientôt dévoiler les titres du nouvel album de Bertignac. L'homme ne change pas. On le croise par médias interposés depuis Téléphone, on le devine rigolard, habité, virtuose et fil de fer. C'est un peu ça. Son sourire est celui d'un gamin à qui on ne la fait pas.
Son enthousiasme à la simplicité débonnaire a de quoi fédérer bien des âmes. Bertignac... LE guitariste hexagonal, la SG toujours et encore en bandoulière. L'enfant de Led Zeppelin, d'Hendrix, des Who, des Rolling Stones, du blues, de l'électricité débridée, du solo qui décolle. Un parcours rock, une reconnaissance nationale. Tout ça, on le sait. Ici, dans cette pièce à l'identité laboratoire, mélange idéal de convivialité et de bohème, c'est une évidence, on préfère, aux bégaiements de l'histoire, la quête du chemin nouveau, l'aventure. Fier de l'avant, bien sûr mais surtout désireux de ne pas s'endormir sur des lauriers mérités, dévoré par une nécessité: se surprendre, fouetter sa passion pour mieux rebondir. C'est presque étrange mais au moment de s'installer, on devine que quelque chose va se passer.
Quelque chose de pas anodin. Des rumeurs ont filtré. Les nouvelles compositions seraient fiévreuses, incandescentes même. On demande quand même à entendre. Parce qu'en France, on nous promet du rock depuis 1960 et on attendrait presque encore... Le fameux complexe face au grand-frère anglo-saxon. L'obsession de la mélodie, le besoin de paroles accessibles. Sempiternelle rengaine. Lassitude. Ca commence. Explosion. Littéralement. On regarde Bertignac. Il sourit. Il sait. Là, c'est comme si tous les compteurs venaient, en un riff, d'être remis à zéro. Oui, en un seul riff, la donne a changé. Bertignac ne tourne pas autour du rock, ne joue pas au plus malin, là, il le percute, l'enlace, le ressuscite.
Carrément. Un blues monstrueux, tellurique, envahit la pièce. Bertignac s'est lâché. Il a ouvert les vannes. La charge est moins héroïque que décomplexée, totale, jubilatoire! Il chante comme jamais. La voix hargneuse, au centre du conflit.
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